Il y a bientôt 10 ans (déjà!), je me surprenais une lame à la main au fond d’un immense gouffre de pensées. Pas d’obstacle matériel, pas de maladie incurrable, de quoi manger, de quoi dormir, une relation extrêmement conflictuelle avec mon seul parent qui n’était que peu présent, une solitude très concrète, et nous avions droit à un coktail classique – à ennuyer le ciel. Alors, simple adolescent en colère? Caprice?

En tout cas du point de vue du patient, il me semblait avoir eu accès à immensément plus. À cette période où la vie, donc, ne me plaisait pas, j’ai comme beaucoup (ou tous) vécu un premier vrai questionnement sur l’espace, l’univers, l’éternité, le temps, l’infini… qui à ce niveau de maturité et de réflexion se solde souvent par une simpliste auto-persuasion de l’inutilité de l’homme tel que vu.

Forcément, cette conclusion propre au penseur primitif s’est plus ou moins traduite par: « La vie, c’est nul ». Mais n’est-ce pas là la genèse des routes prises par les plus grands penseurs?

Il n’est pas de position plus fausse que d’avoir compris et de rester encore en vie.

— De l’inconvénient d’être né, Cioran (1973)

Ceci dit, bien prétentieux quelconque lycéen voulant nous faire croire avoir compris, et là repose tout l’intêret de ces quelques mots. Sûrement animé à l’époque par la simple curiosité de la seconde d’après, du lendemain, de l’année et de la décénnie suivante, je m’en suis tenu à ça; et depuis de l’eau a coulé sous les ponts.

Nous voilà donc presque 10 ans plus tard, plus proche que jamais – mais encore si loin! – du graal de toute reflexion en ce monde, la réponse. Réponse que nul n’a et que nul ne peut concevoir – en tout cas nul que je puisse toucher.

Alors, s’il y a une unique quête à laquelle je veux exceller, un unique savoir que je veux accueilir dans son intégralité la plus précise, c’est bien cette réponse; celle qui ne répond à rien – donc à tout.